Les Caraïbes plus abordables que jamais !

En janvier dernier, d'excellents quatre étoiles de Varadero ou de Punta Cana étaient soldés à moins de 800$ la semaine. Il y avait même une offre à 679$, aussi pour un quatre étoile! «Il y a cinq ans, ces hôtels-là se seraient vendus à plus de 1000$, commente Éric Rose, copropriétaire de Voyages Bergeron, une des principales agences québécoises actives sur l'internet.D'ailleurs, à l'époque, nous n'avions plus rien à proposer deux semaines avant le départ. Aujourd'hui, les consommateurs savent qu'en attendant la dernière minute, ils bénéficieront de tarifs ridicules.»

Une constatation approuvée par Sam Char, directeur général de Vacances Sunwing au Québec. «La clientèle ne se laisse plus séduire par les réductions que nous lui proposons en début de saison pour l'inciter à réserver longtemps à l'avance, constate-t-il. Actuellement, nous vendons plusieurs milliers de forfaits chaque jour. Tous les soirs, j'épluche les ventes de la journée et je constate que la presque totalité porte sur des départs dans les trois prochaines semaines. Beaucoup de réservations concernent même des départs dans les deux jours suivants.»

André Poulin, président de Jaimonvoyage.com, estime que 70% des forfaits Sud se vendent moins de trois semaines avant le départ. À prix réduit, bien sûr!

Même si les offres à moins de 800$ abondent, le prix moyen des forfaits pour les destinations soleil s'élève à 1100$ environ. «Mais il devrait flotter entre 1400$ et 1600$, estime Sam Char.En dehors des périodes des congés scolaires, nous subventionnons quasiment les consommateurs pour qu'ils aillent dans le Sud.»

Les périodes au cours desquelles les aubaines se font rares sont celles des Fêtes de fin d'année, les semaines de la relâche scolaire et le congé de Pâques. Le reste de l'année, les prix chutent et la tendance à la baisse s'accentue. Les consommateurs en sont conscients. «Ils surveillent nos sites web comme on suit les cours de la Bourse», note Éric Rose.

Les sites web dont il parle sont ceux des agences québécoises spécialisées dans la vente de forfaits à prix réduit sur l'internet. Elles sont moins d'une dizaine à s'approprier la part du lion dans ce créneau: Voyages Bergeron, Voyages à rabais, Voyages destination, Jaimonvoyage.com, Vosvacances.ca, Achatvoyages.com, Voyages écono... Ce sont les vitrinessur le web d'agences bien établies.

Ainsi, Achatvoyages et Vosvacances.ca sont les filiales virtuelles de Voyages Constellation, à Montréal. Voyages écono est l'extension web des agences Vasco, présentes dans toutes les régions du Québec. Dans les deux points de vente de Voyages Bergeron (à Montréal et à Longueuil), des équipes de conseillers vendent des circuits en autocar ou des forfaits en Europe, en dispensant force conseils. Mais le site web de l'agence écoule chaque année des milliers de forfaits pour le Sud à prix réduits sans qu'un conseiller soit obligé d'intervenir, sinon pour régler des points de détail.

«Jadis, les consommateurs n'osaient pas appeler leur agent de voyages deux fois par jour pour demander si les prix avaient baissé. Aujourd'hui, ils peuvent consulter nos sites internet 10 fois par jour sans se gêner, note Éric Rose.Quand les prix baissent, les ventes déboulent. Quand les prix montent, le flux des réservations se tarit.»

Tous les acteurs de l'industrie du voyage s'accordent pour attribuer la chute des tarifs à la surcapacité. Au Québec, cinq importants acteurs se livrent une concurrence acharnée pour s'arracher des parts de marché: Transat (avec ses deux marques Vacances Transat et Nolitours), Tours Mont-Royal, Vacances Sunwing, Vacances Air Canada et Vacances WestJet. Ils inondent le marché de sièges d'avion et les consommateurs en profitent.

Jusqu'à l'an dernier, la majorité des aubaines portait sur les stations cubaines et sur Puerto Plata, une destination réputée en déclin. «Il y avait trop d'hôtels à Varadero, donc les hôteliers baissaient leurs prix, explique Yvon Michel, président de Tours Mont-Royal. Par effet de ricochet, les Cubains sont aussi obligés de baisser les prix dans les autres destinations de l'île, sinon, elles ne se vendraient pas.» Mais Cuba n'a plus le monopole des prix réduits. «Il y a aujourd'hui 60 000 chambres d'hôtel à Cancún et dans la Riviera Maya, poursuit Yvon Michel. C'est plus que dans toutes les destinations cubaines réunies. Et chaque année, on y inaugure de nouveaux méga-complexes. L'offre a dépassé la demande et les hôteliers sont obligés de solder leurs chambres.»

Les prix vont-ils continuer à baisser? Dans trois ou quatre ans, pourra-t-on encore séjourner dans des quatre étoiles en hiver, en déboursant moins de 800$? «Cela dépend d'une série de facteurs trop complexes pour qu'on puisse le prédire, répond Yvon Michel. La surcapacité va-t-elle persister sur le marché canadien? Va-t-on continuer à construire de nouveaux hôtels au même rythme? Les Européens viendront-ils plus nombreux dans les Caraïbes? Si les islamistes prennent le pouvoir en Tunisie, en Égypte et au Maroc, les Européens pourraient affluer dans les Caraïbes et sur la Riviera Maya. Et les prix grimperaient.»