Mardi 24 juillet dernier, le maire de la commune du Biot (Haute-Savoie) a annoncé vouloir démonter les télésièges de la petite station de Drouzin-le-Mont. Abandonner le ski alpin pour se consacrer exclusivement à la «montagne douce», serait-ce la seule alternative pour les années à venir ?
Le ski serait-il en train de devenir un sport en voie de disparition? Faudra-t-il bientôt remplacer nos moufles et notre bonnet par un maillot de bain et des tongs dans notre valise pour les vacances d'hiver? C'est en tout cas ce que laissent présager de nombreuses études relatives au changement climatique actuel. D'après l'Observatoire pyrénéen du changement climatique, l'élévation de la température a fait perdre près de 15 jours d'enneigement aux Pyrénées ces dernières décennies. C'est encore pire du côté des Alpes car, selon l'OCDE, le réchauffement y est trois fois supérieur à la moyenne mondiale.
Pour prendre les devants sur cette situation, de nombreuses stations de moyenne montagne, comme celle de Drouzin-le-Mont, risquent de fermer prochainement leurs portes au ski alpin pour se tourner vers la «montagne douce». Henri-Victor Tournier, maire de Biot depuis 2001, a déclaré à l'AFP qu'il tenait «à ce que la reconversion soit faite avant mars 2014» (date des prochaines élections municipales). La préfecture de Haute-Savoie est du même avis, comme le laisse entendre le sous-préfet de Thonon-les-Bains, Jean-Yves Moracchini, qui considère que «les stations de moyenne montagne n'ont pas d'avenir à dix ou quinze ans en raison du changement climatique». «Plus une station se reconvertit tôt et plus elle sera attractive» ajoute-t-il. Faudra-t-il donc bientôt nous débarrasser de nos skis et de notre snowboard pour les troquer contre des raquettes, un VTT ou des chaussures de randonnée? «Il y a plein de choses à faire en montagne sans avoir des câbles au-dessus de nos têtes. On aura du monde, je n'ai pas peur.» confie, serein, le maire de Biot. Les jeunes choisiront-ils de passer leurs vacances d'hiver à faire des promenades en raquettes plutôt qu'à dévaler les pistes en ski, snowboard ou snowblades ? Rien n'est moins sûr.
Mais en réalité, le réchauffement climatique est loin d'être le premier souci des élus locaux et les raisons de cette reconversion sont un peu plus matérielles. En effet, la petite station familiale connait un déficit croissant depuis plusieurs années, ce qui a poussé son promoteur immobilier, Michel Vivien, à se poser des questions sur l'avenir de son domaine. De fait, selon la mairie, Drouzin-le-Mont perd entre 120 000 et 150 000 euros chaque année. Propriétaire de la station depuis 1998, Michel Vivien n'exclut donc plus la fermeture de son exploitation.
Cependant, les propriétaires de résidences secondaires ne sont pas de cet avis et comptent bien se faire entendre. Une association regroupant environ 400 foyers a donc été créée afin que leurs revendications soient prises en compte. Jean Beslard, président de cette coalition, considère que «s'il n'y a plus de station, les appartements vont perdre entre 25 et 50% de leur valeur». En effet, avec la fin du ski alpin, il n'est pas certain que les gens se battront pour acheter des logements à Biot. Les résidents temporaires sont donc prêts à «participer au déficit de la station» en proposant des solutions telle que l'augmentation des impôts locaux. Jean Beslard va même jusqu'à menacer d'inscrire son propre nom sur les listes électorales afin de faire «sauter» le maire de cette petite commune d'environ 450 habitants en vue des élections municipales de 2014.
Cette affaire est non sans rappeler celle d'une station voisine, Abondance, qui avait, elle aussi, décidé d'abandonner le ski alpin en raison d'un déficit chronique. Bien qu'elle ait fermé ses télésièges en 2007, elle changea tout de même d'avis en les rouvrant deux ans plus tard, grâce à sa reprise par des investisseurs américains. Cependant, n'arrivant par à rendre l'exploitation lucrative, ces derniers ont fini par la rendre à la mairie en 2011.
Affaire à suivre.